Mes chers compatriotes,
Il est des temps où le ridicule ne tue plus. Il s’installe, s’étale, parade et prend même un micro pour donner des leçons à autrui.
Deux jeunes gens venus d’Abidjan, visiblement en mal de projecteurs, ont décidé, avec l’aplomb de l’ignorance et l’arrogance de l’incompétence, de se mêler du destin du Togo, un pays qu’ils ne connaissent ni d’Ève ni d’Adam. Ils n’en maîtrisent ni l’histoire ni les réalités, ni les douleurs ni les efforts. Mais cela ne les a pas empêchés de choisir leur camp : celui des pirates de la toile, des sorciers numériques, des pyromanes de la République.
Il paraît que la bêtise est la seule marchandise que certains exportent sans visa. Et voilà que ces deux jeunes Ivoiriens, fraîchement échappés d’un obscur anonymat, se découvrent soudain une vocation de tribun révolutionnaires, mais attention : à l’étranger, bien entendu ! Le Togo, terre de paix, devient pour eux le théâtre rêvé où ils espèrent jouer, mal jouer plutôt, la pièce d’un engagement qu’ils n’osent même pas jouer chez eux.
Korolait et Âne Noir Qui Rit. Deux pseudos, deux bouffons, deux cymbales bruyantes sans mélodie. Les voilà donc qui, sans jamais avoir mis un pied au Togo, se découvrent experts en gouvernance, en insurrection numérique, en conseils aux peuples africains. Ils hurlent à la dictature, dénoncent l’ordre établi, appellent à la rupture, mais pas chez eux. Oh non ! Pas chez eux, où un quatrième mandat se prépare en silence pendant que leurs bouches se ferment comme des clapets et comme par magie.
Et pourtant, la sagesse voudrait que chacun balaie devant sa porte. Mais eux ont préféré traverser la rue, le balai à la main, pour venir se mêler d’une maison qui n’est pas la leur. Ils ont laissé la poutre dans leur œil pour venir scruter la poussière dans le nôtre. Ils ont tourné le dos à l’éléphant pour courir après l’ombre d’une souris.
Oui, pendant qu’à Abidjan, les débats grondent autour d’un quatrième mandat, pendant que les rues parlent et que les cœurs s’interrogent sur la pérennité d’un pouvoir devenu éternel, Korolait et Âne Noir Qui Rit détournent l’attention en s’érigeant en procureurs virtuels contre le Togo. Car voyez-vous, la lâcheté a une odeur, celle du mensonge recuit dans l’hypocrisie. Ces deux-là veulent laver le Togo avec une éponge sale. Ils abandonnent les problèmes de leur propre patrie pour se jeter sur les affaires d’un autre État comme des chiens sur un os jeté. Ils n’ont pas combattu le silence chez eux, mais ils braillent ici, dans un vacarme inutile et absurde. C’est l’ombre qu’ils pourchassent, pendant que la proie les regarde s’éloigner en ricanant.
À ceux-là, nous disons : que pensez-vous de votre propre maison ? Avez-vous un avis sur la démocratie chez vous, ou êtes-vous devenus muets comme des tambours crevés dès qu’il s’agit de la Côte d’Ivoire ?
Vous riez du Togo, mais c’est bien votre propre reflet que vous moquez. Vous distribuer des jugements, mais vos mains sont vides d’exemples. L’arroseur est arrosé, et le donneur de leçons finit par se faire corriger par la vérité.
Qu’ils s’occupent de leur pays ! Qu’ils aillent demander à leur Président ce qu’il en est du respect des promesses, de l’alternance, de la voix du peuple. Qu’ils aillent déclamer leurs slogans à Yamoussoukro, s’ils ont un peu de tripes. Mais ils ne le feront pas. Parce qu’ici, au Togo, ils espèrent un public. Ils espèrent une caisse de résonance. Ils espèrent briller dans l’obscurité de leur propre insuccès.
Alors non, nous n’allons pas leur donner ce plaisir. Car nous, nous n’avons pas besoin de cours de morale par correspondance. Et encore moins de la part de ceux qui vivent dans des maisons de verre et jettent des pierres.
À ceux qui cherchent le buzz, nous opposons notre indifférence. À ceux qui parlent sans savoir, nous laissons leur ignorance éclater au grand jour. Et à ceux qui rient de nous, nous rendons leur ricanement, en miroir, amplifié par le mépris. Le Togo n’est pas votre terrain de jeu. Allez jouer ailleurs.
À chacun son combat. Et aux imposteurs, le silence.
TAL Alassani
